​Depuis un certain temps, des bâtiments scolaires et ceux de certaines institutions du pays, des ouvrages sociaux sont drapés aux couleurs du parti au pouvoir. Certaines autorités publiques débordantes de zèles se permettent de faire des apparitions publiques vêtues aux couleurs de ce parti. Dans la nuit du 29 avril 2024, un bulletin d’information a été présenté par un confrère en chemise blanche avec cravate bleue turquoise. Cette plaisanterie de mauvais goût qui est l’œuvre des nostalgiques d’un passé récent, consacre parmi tant d’autres, le déficit démocratique en cours au Togo qui ne cesse de mettre ce pays, au ban de la communauté internationale.
​Il n’est pas rare de rencontrer dans des villes du Togo, des bâtiments scolaires, souvent construits aux frais des contribuables, peints aux couleurs du parti au pouvoir. Le décor ainsi planté, fait craindre une immersion de la jeunesse dans les méandres de l’idéologie politique de ce parti. Comme si cela ne suffisait pas, certains chefs d’établissements scolaires, n’hésitent pas d’habiller leurs élèves en tee shirts et casquettes aux couleurs et symbole de ce parti, sur leur pantalon ou jupe kaki, pour faire la haie pendant des heures, juste pour ovationner à leur passage, les premiers responsables de ce parti, en congrès dans leur localité. ET EN TOUTE IMPUNITE. Dans un contexte de multipartisme, le fait est inadmissible. Au regard des textes en vigueur dans le pays, il est éminemment répréhensible. Même le bâtiment de la direction de l’Université de Lomé ne fait pas exception parce que peint en blanc et bleu.
​Entre temps, le ministre togolais de l’Enseignement Primaire, Secondaire, Technique et de l’Artisanat, le Professeur Dodzi Komla Kokoroko, a annoncé une nouvelle réglementation concernant la couleur des bâtiments scolaires. Mettant fin à la pratique de peindre ces bâtiments aux couleurs de partis politiques, entre autres. Le ministre a déclaré que désormais, les bâtiments scolaires devront respecter un code couleur spécifique établi par le ministère.
​Dans une note publiée le 7 juillet, intitulée « Code couleur (Badigeon et peinture) pour les bâtiments scolaires (MEPSTA) », le Professeur Kokoroko a détaillé les nouvelles directives. Les murs devront être peints avec de la « chaux vive teintée d’ocre jaune », tandis que les claustras devront comporter de la « chaux vive légèrement piquée d’ocre noir ». D’autres éléments architecturaux, tels que les soubassements, les saillies des poteaux, les chaînages et les consoles, devront être peints avec de la « chaux vive teintée d’ocre rouge ».
Enfin, les « portes, fenêtres, murs allèges sous claustras et sous tableau à l’intérieur des salles de classe, murs sous claustras à l’extérieur des salles de classe sur la façade principale, et sous allège dans le bureau et magasin » devront être peints en « marron N°1680 ».
Si le ministre Kokoroko a tenté d’arrêter l’hémorragie, dans son département, ce n’est pas encore le cas dans d’autres. Entre autres, la santé, la sécurité…
​En effet, à travers le pays, on dénombre des centres de santé, construits par des deniers publics dont les bâtiments sont peints aux couleurs du parti au pouvoir. Dans ce même pays, de nombreux véhicules de police sont des mêmes couleurs. Même un commissariat dans une ville du littoral en dehors de Lomé mais en bordure de l’océan arbore ces couleurs.
​Loin de nous, l’idée de blâmer une institution pour ses couleurs. On peut objecter que l’usage du bleu et du blanc sur des véhicules et certains bâtiments de la police n’a rien de considération partisane politique et que ces couleurs traditionnellement sont affectées à ce corps de métier. Si c’est le cas, il va falloir définir un cadre juridique qui indique aux partis politiques les couleurs à ne pas utiliser parce que déjà adoptées par des institutions de la république. Juste pour éviter la confusion dans les esprits.
​L’autre grande déception vient d’un média public qui, de plus en plus, prend des allures d’une caisse de résonnance du parti au pouvoir, sur lequel, désormais, le culte de la personnalité et la flagornerie dithyrambique qui encense ce parti, font bon ménage. Le 29 avril, dernier au soir du jour du vote, pour présenter le journal de 20 heures, il a fallu au préposé, de porter une chemise blanche sous une cravate bleue. Par décence, nous passons sur les interprétations pour le moins, monstrueuses suscitées par cet événement, apparemment anodin, mais bardé d’une panoplie de messages politiques, au sein du public.
​Cette ‘’unirisation’’ tous azimuts qui ne rend aucun service au président Faure Gnassingbé, connu pour son attachement au réel et à l’utile, est de nature à tirer le pays vers le bas. Pour les besoins de la cause, le Togo doit se démarquer de toutes pratique assimilable à une réminiscence du parti unique. L’’’urinisation’’ tous azimuts doit cesser au Togo.

Le Changement