1994 – 2024 : il y a 30 ans, le Comité d’Action pour le Renouveau (CAR) de Me Yawovi Agboyibo, créait l’événement avec l’Union Togolaise pour la Démocratie (UTD) d’Edem Kodjo, aux élections législatives en remportant la majorité absolue, des sièges au grand dam du parti au pouvoir de l’époque, le Rassemblement du Peuple Togolais (RPT), soit, 43 des 81 sièges que comptait le parlement. C’était aux lendemains de la Conférence nationale réunie en juillet et août 1991 ayant débouché sur la mise en place d’un Haut-Commissariat de la République (HCR), parlement de transition présidé par Mgr Philippe Fanoko Kpodzro et d’un gouvernement d’union de transition (Gunt) dirigé par Me Joseph Kokou Koffigoh, par la suite malheureusement vidé de sa substance par des intrusions répétées de l’armée dans le processus. Cet exploit historique du CAR sous l’égide de feu Me Yawovi Agboyibo, aucun parti ou groupe de partis politique (s), ne l’a réalisé à ce jour au Togo. A la veille des prochaines élections couplées (législatives et régionales), les partis d’opposition en lice, pourront-ils s’inspirer de cette performance légendaire pour faire répéter l’histoire au Togo?
Officiellement le Rassemblement du Peuple Togolais (RPT) avait été crédité de 38 sièges contre 36 pour le CAR et 7 pour l’UTD. L’événement était extraordinaire parce que le scrutin avait, à l’époque été organisé par une Commission Nationale Electorale (CEN) qui n’était pas indépendante. En d’autres termes, le processus avait été dirigé de bout en bout par une majorité écrasante de représentants du pouvoir et du parti au pouvoir qui avaient l’attitude de se permettre n’importe quelles irrégularités pour offrir au Gal Eyadema Gnassingbé, la majorité dont ce dernier avait tant besoin en vue d’une mainmise totale sur le pays. Cette performance du CAR était, en dehors de la densité et la qualité d’homme politique avéré du président de ce parti, Me Yawovi Agboyibo, due à la prise de position de ce dernier dans des dossiers à caractère social, voire de défense des droits de l’homme.Me Agboyibo avait, en effet, fait de la défense des droits des déshérités, son cheval de bataille. Du Nord au Sud et de l’Est à l’Ouest, il s’était illustré par son combat contre l’injustice sociale. Déjà en 1987, il créa et présida la Commission Nationale des Droits de l’Homme CNDH. Il a œuvré à faire reculer les cas de détentions arbitraires, de tortures, d’extraditions illégales, rétablir la liberté religieuse, les libertés d’opinion et de presse, la liberté d’association, lever les entraves à la libre fabrication et la libre circulation des liqueurs locales, à l’humanisation des textes de protection de la faune, de la flore et des eaux fluviales etc. Cet engagement lui a valu de siéger au Conseil Pontifical ‘’Justice et Paix’’ du Vatican et d’obtenir à Bonn le Prix allemand d’Afrique en mai 1993. Au plan politique, il lui a été reconnu parmi tant d’autres, le courage dont il a fait montre en lançant l’appel au soulèvement populaire de mars 1991 contre la dictature, ouvrant ainsi la voie à la tenue de la conférence nationale. En conséquence, avant, pendant et après la campagne électorale de février 1994, à travers le pays, on a assisté à une déferlante acquise à la cause du parti au service des déshérités qui ne faisait aucun mystère sur une victoire écrasante. La détermination des électeurs à voter le CAR était si manifeste que lors de la campagne du deuxième tour, les consignes de vote en faveur de l’UTD, données par Me Yawovi Agboyibo ont été suivies à la lettre. Dans certaines circonscriptions électorales, des candidats du CAR se seraient désistés en faveur de ceux de l’UTD, au second tour, avaient affirmé des observateurs. Selon la constitution, le premier ministre est nommé par le Président de la République au sein de la majorité parlementaire qui, en 1994 était issue de l’opposition. Redoutant la menace permanente que pouvait constituer une majorité issue de l’opposition sur son pouvoir et surtout le basculement du RPT, le parti au pouvoir de l’époque dans le giron de l’opposition, le Gal Eyadema a recouru à un stratagème avec une complicité supposée ou réelle du président de l’UTD, Edem Kodjo. Alors que tout le peuple se préparait à applaudir une coalition CAR-UTD pour abattre le RPT au parlement, le président de l’UTD monta au créneau pour proclamer parti chanière, sa formation politique; Au même moment où feu Gal Eyadema Gnassingbé ‘’débauchait’’ deux(2) députés du CAR et un(1) de l’UTD. Ce manège a conduit à un renversement de la configuration politique au parlement désormais constituée par une majorité RPTUTD. Ce qui avait permis au Gal Eyadema de nommer à la primature, le président de l’UTD, de feu Edem Kodjo et de préparer à Me Agboyibo la présidence du parlement une proposition fermement déclinée par le président du CAR. Ainsi, était malheureusement passée par pertes et profits pour l’opposition et le peuple tout entier, cette victoire historique du CAR et de l’UTD aux législatives de février 1994. Pour empêcher Me Yawovi Agboyibo de rééditer cet exploit historique, ces compagnons de lutte ont fait de lui, un ennemi à abattre. Une campagne de diabolisation sur fond de dénigrements et de mensonges grotesques susceptibles de faire voler aux éclats toute formation politique, a par la suite, été lancée contre le Bélier noir de Kouvé. Ce dernier, doué d’une capacité de résistance redoutable, n’en a jamais succombé. Au contraire, il s’est par la suite, honorablement illustré sur la scène politique où il a écrit les plus belles pages de la lutte pour un changement démocratique au Togo. Le pays lui doit, entre autres, l’architecture de l’Accord Politique de Base, par la suite dilué en un vil Accord Politique Global dont les dispositions, n’ont jamais été globalement appliquées avant la plongée du pays dans la spirale des révisions constitutionnelles qui ne finissent pas de le tirer vers le bas. Dans les jours prochains, les Togolais iront aux urnes pour la désignation des députés et des conseillers régionaux. Puissent les partis d’opposition en lice, s’inspirer non seulement de la méthode mais aussi, de la démarche de feu Me Yawovi Agboyibo, pour donner de nouveau, un sens à la lutte pour la démocratie, entre temps, enfouie au creux de la vague par les tenants d’un radicalisme de salon qui n’a jamais rien apporté au peuple togolais martyrisé. Amou

