Le vendredi 12 juillet 2024 à Lomé, le gouvernement togolais et la Banque mondiale ont lancé un nouveau cadre de partenariat pays et signé trois accords de financement. Le tout, pour un montant global de 1,5 milliard de dollars US, soit 900 milliards FCFA. Si l’événement ne cesse d’être célébré par les affidés du parti au pouvoir qui en font un trophée de chasse, au sein de la population, il suscite de la méfiance. Et pour cause, de nombreux Togolais se demandent comment ceux qui n’arrivent pas à gérer au mieux 30 milliards de F CFA destinés à la construction d’une route, peuvent-il gérer 900 milliards.

Selon des sources bien informées, ce nouveau cadre de partenariat vient ainsi couronner l’engagement du chef de l’Etat, Faure Essozimna Gnassingbé, en vue de renforcer l’économie nationale. « L’approbation de ce nouveau cadre de partenariat est le fruit des échanges de haut niveau qui ont marqué le séjour du chef de l’État, Faure Essozimna Gnassingbé, à Washington DC, lors des Assemblées annuelles 2022 du Groupe de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international », a déclaré Sandra Ablamba Johnson.

Ce cadre de partenariat quinquennal entre le Togo et la Banque mondiale, est dit-on, le résultat des réformes initiées par le Togo depuis quelques années. De l’amélioration du climat des affaires, à l’assainissement de la gouvernance économique, le Togo a enregistré des progrès significatifs qui ont conduit à cette augmentation du portefeuille pays de la Banque mondiale.« Cet accroissement du portefeuille du Groupe de la Banque mondiale est à l’image des performances du Togo sur le plan économique ces dernières années. Les perspectives pour l’année 2024 prévoient une croissance de 6,6%, plaçant ainsi notre pays parmi les vingt économies du monde qui devraient connaitre les taux de croissance économique élevés en 2024 », a indiqué le ministre de l’Économie et des finances, Sani Yaya.

Les mêmes sources indiquent qu’avec ce nouveau portefeuille de 900 milliards FCFA, le gouvernement va davantage œuvrer en faveur de la création d’emploi pour les jeunes, de l’agriculture et l’agro-industrie, la logistique et la connectivité, l’énergie en milieu rural, le soutien aux populations affectées par les questions sécuritaires, et des appuis additionnels aux secteurs de l’éducation et de la santé. Sortant du rang des pays fragiles, le Togo peut bénéficier désormais des prêts concessionnels, à très long terme voire la possibilité d’un remboursement à partir de la 50eme année.

Si dans les cercles du pouvoir, l’euphorie suscitée par l’événement est à son comble, au sein de la population, la méfiance est de mise. Tout comme la suspicion.

« Si la Banque mondiale accorde une telle enveloppe à  notre pays, on ne peut que s’en réjouir, vu que le gouvernement ne manquera plus de quoi réaliser un certain nombre de projets pour répondre aux urgences sociales. C’est un véritable jackpot que vient de gagner notre pays, grâce à l’équation personnelle du Chef de l’Etat. On doit reconnaitre que ce n’est pas à n’importe quel pays que la Banque mondiale fait une telle confiance. Les Togolais doivent se sentir heureux, car il y va de leur bien-être », jubile, sur le site du Cetef, un agent  de l’administration.

Ceux qui n’entendent pas les choses de la même oreille, font preuve d’un scepticisme débordant.  Ils se demandent comment peut-on remettre 900 milliards de nos francs pour la gestion des projets à quelqu’un qui n’a pas su réaliser un projet de construction de route  d’une trentaine de milliards.

Réaction d’un acteur de la société civile : « Dans ce pays une trentaine de milliards de F CFA avaient été débloquée pour la construction de la route Lomé-Vogan-Anfoin. Nous connaissons la suite. Le chantier a été abandonné par l’entreprise de construction. Par la suite, on a dû recourir à une entreprise chinoise qui a fait un travail approximatif qui fait crier d’horreur les usagers et qui ne garantit à ces derniers, la moindre sécurité, le plus grave, c’est cette impunité qui est garantie aux diverses personnes impliquées dans ce dossier. Jamais ils n’ont fait l’objet de poursuites judiciaires, tout comme ceux qui sont impliqués dans le détournement des fonds cotisés pour le soutien des Eperviers à la CAN. Comment on peut vivre comme ça dans un pays ? Quelle est la garantie que ce fonds, sera en toute transparence?»

Obtenir des aides auprès des institutions financières pour la réalisation des actions de développement n’est jamais mauvais en soi. Au contraire, il s’agit des opportunités à saisir au vol pour la satisfaction des aspirations des populations dans nos pays où tout est à refaire. Ce qui fait peur cependant, c’est l’incapacité de gestion dans la transparence relevé au niveau de certains fonds. Ce manquement nérite d’être corrigé par l’engagement des poursuites judiciaires à l’encontre des détourneurs de deniers publics.

Au-delà de toutes spéculations, il faut avoir à l’esprit que ces 900 milliards que la Banque mondial va décaisser pour le Togo, n’est pas un cadeau. C’est un prêt remboursable à partir de la 50ème année, non par nous, mais par nos petits  fils, probablement  avec intérêts. Pour cette raison, chaque responsable qui viendrait à être impliqué dans la gestion de ce fonds, doit faire en sorte qu’à l’heure du remboursement,  nos petits fils ne grincent pas les dents en s’interrogeant sur ce que leurs arrières  grands parents que nous sommes ont bien pu faire de ce fonds. Nos petits enfants ne doivent pas payer pour des bêtises que nous aurions commises en détournant en toute impunité, les aides financières que les institutions de Brettons Wood nous accordent et qui seront remboursées des années après nous.   

JNT